Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Les délices de la maladresse

Publié le par L'atelier d'Annik

Bien sûr, la maladresse est pour moi une manière de refuser le «culturellement correct», l'acquis, l'appris, le bienséant.
Mais elle est bien plus.

Lorsque je ne suis plus préoccupée de la façon dont je vais tracer mon trait, ma forme, je suis juste à l'écoute, comme le stylet d'un sismographe posé sur le papier, prêt à enregistrer les plus légers tremblements de la terre – ou ses colères.
Le trait ne m'appartient plus. Il est là, se déroule au fur et à mesure qu'il se trace., plus ou moins rapidement, légèrement. Je suis plus motrice qu'actrice, et même spectatrice. Et lorsque j'interviens pour diriger le trait, c'est pour tout ravager.

Il ne s'agit pas de dessin automatique. Je ne suis pas en état de semi-conscience, d'alter-conscience ou que sais-je. Je suis pleinement présente à moi-même, au monde. En hyper sensibilité., plutôt.
J'adore cette acuité de la conscience inaltérée par la volonté, lorsqu'elle advient…

Lorsque je reconnais une forme, j'arrête mon trait – du moins j'essaie. Il ne sait pas, lui, qu'il y a une forme. Laisser apparaître une forme, c'est tuer toutes les autres. Les lectures s'empilent sur les dessins, lorsqu'ils sont réussis: celle de l'instant, celles que j'ai refusées, celles que j'ai avec de plus en plus de recul dans le temps.

La première fois que j'ai découvert les délices de la maladresse, c'était en même temps que ma découverte du dessin sur ordinateur. A la souris, sur des fonds grossièrment texturés, je traçais des lignes qui m'évoquaient des animaux fantastiques, que jamais je n'aurais dessiné avec un outil maîtrisé. Un monde magique prenait forme, grâce à mon manque de contrôle.
J'ai immédiatement pensé aux peintures rupestres, à leur grâce et à leur sensibilité – que j'étais loin d'égaler avec ma souris, fruit du labeur de tant de cerveaux et de technologie… Et j'ai compris comment l'homme de ces temps anciens avait pu être fasciné à la fois par les reliefs de ces grottes, changeants au gré de la lumière des torches, puis de la puissance qu'un trait pouvait apporter à un relief, en lui donnant vie.

Toutes proportions gardées, cette impression de magie persiste pour moi, lorsque le trait que j'ai laissé se poser sur le papier est juste et sensible. Lorsque je suis émue de ce trait, quelque chose de plus grand que moi s'est passé.

Processus de création
Commenter cet article
P
Merci pour votre com sur la philo de la perception, j'ai parcouru votre article sur la création, bonnes références livresque.<br /> <br /> Ma démarche tente d'aller au-delà des ces aspects en examinant les pistes de travail explorant la source de la création : L'inconscient.<br /> <br /> Bonne continuation.
Répondre